vendredi 6 février 2015

6 février 2015 : Rangoon

Pleins d'ardeur, nous nous sommes levés dès 5 heures 45. Une demi-heure plus tard, nous étions dans un taxi à destination, de nouveau, de la Shwedagon... Quand nous sommes sortis de l'hôtel vers 6h20, des gens étaient déjà attablés dans la rue devant des assiettes de nouilles ! La circulation étant encore fluide à cette heure très matinale, nous étions au pied d'un des escaliers monumentaux qui montent à la Shwedagon, peu avant 6 heures et demie. Les marchandes finissaient d'installer les offrandes mises à la disposition des fidèles pour leurs dévotions. Le jour était levé, mais les rayons du soleil n'atteignaient pas encore les cimes de la myriade de stupas qui entourent la Shwedagon. Le site est alors fréquenté essentiellement par des autochtones, qui s'y rendent souvent avant d'aller travailler. Les touristes sont peu nombreux, à part quelques courageux comme nous. Les gros bataillons n'arrivent guère avant 8 ou 9 heures du matin...

Nous avons passé de nouveau deux bonnes heures sur le site. Cette visite n'était pas redondante avec celle d'hier soir, mais complémentaire : une lumière différente et évolutive, une ferveur peut-être encore plus marquée chez les fidèles, une bienveillance toujours très grande à l'égard des étrangers que nous étions, et pour nous une atmosphère différente et la découverte de nouveaux détails architecturaux ou ornementaux. Une telle prolifération d'éléments décoratifs sur un même site (niches, frises, statues, statuettes, corniches ciselées, mosaïques etc) est difficilement concevable.













Nous n'avions pas vu hier "l'arbre de la Bodhi" ("Bodhi tree"), de taille pourtant imposante. Après avoir longtemps médité sous des jambus, le Bouddha aurait atteint l’illumination ou bodhi, sous un pipal à Bodh Gaya ; cet arbre, appelé Bodhimanda ou Bo, occupe donc une place particulièrement importante dans la mythologie bouddhiste ; ses feuilles sont devenues un motif iconographique ainsi qu’un porte-bonheur. Nous avions manqué également une "empreinte du pied de Bouddha", travail de sculpture d'un artiste sacré, vénéré par les fidèles.


Comme Olivier l'avait fait hier soir au niveau du "friday corner", j'ai sacrifié au rituel consistant à verser une eau purificatrice sur une petite statue de bouddha disposée à l'emplacement dévolu au jour de la semaine où l'on est né, pour moi, un lundi. Les bouddhistes accordent en effet une importance particulière à l'astrologie.

























Au chapitre de l'insolite, nous avons observé une jeune femme en train de réciter ses prières à partir des textes défilant sur son... téléphone portable !

De retour vers 9 heures, nous avons pris un copieux petit-déjeuner, avant de passer le reste de la matinée au calme et au frais dans la chambre pour actualiser... le blog !

L'après-midi a été bien occupée. Toute sortie est l'occasion de succomber à la tentation de saisir de nouvelles scènes de rues.













Nous avons déjeuné d'un dosa (un plat indien) dans une gargote du centre ville.


Comme nous avons préféré le train au bus pour notre déplacement de demain, il fallait sans plus tarder procéder à l'achat des billets et aux réservations de places. L'expérience en soi vaut la peine d'être vécue. Le candidat au voyage pénètre dans un vaste hangar à clairvoix, qui a tout du coral. On s'attendrait à voir des animaux parqués là. En fait, l'endroit est désert. Les réservations se font "à l'ancienne" : pas d'outil informatique, mais un bon vieux carnet à souche et un registre sur lequel l'agent consigne le nom des voyageurs et leurs numeros de wagon et de place ! Le trajet n'est pas ruineux, puisqu'il nous revient à 1200 kyats chacun, soit environ... 1 euro par personne pour une distance estimée à 160 kilomètres, à une vitesse certes très modérée et dans des conditions, paraît-il, plutôt spartiates. Mais, c'est le moyen le plus sûr pour être au contact de la population nous aurons d'autres occasions de voyager en bus !



Une autre expérience insolite nous attendait, après avoir connu les inévitables embouteillages de circulation : la visite du Musée national de Yangon. Installé depuis 1996 dans le quartier des affaires et des ambassades (non loin d'ailleurs de l'Ambassade de France aperçue du taxi), c'est un musée un peu fourre-tout où photographier est interdit. C'est dommage car il conserve des objets intéressants. La pièce maîtresse est le trône dit du Lion, qui a miraculeusement traversé les ans grâce à un heureux concours de circonstances. Enlevé du palais de Mandalay par les Britanniques, il fit un séjour de plusieurs décennies au musée de Calcutta, avant d’être rétrocédé à la Birmanie, au lendemain de l’indépendance par Lord Mounbatten. Il fut ainsi préservé, car les huit autres trônes ont été détruits lors des bombardements des Alliés, pendant la Seconde Guerre mondiale. A l’avant du trône, sculpté sur toute sa hauteur (8 m), on reconnaît Lawkanatha, le musicien aux dons tout à fait particuliers : selon la légende, il réussit par son chant et sa danse à pacifier des bêtes féroces en plein combat. Tout autour de la salle, on peut voir les maquettes des autres trônes. Les autres salles du musée présentent un intérêt inégal, mais, outre quelques objets de valeur, j'ai apprécié la centaine de mannequins vêtus des costumes traditionnels des différentes ethnies du pays. Le hic, c'est que les cinq niveaux du musée sont d'une tristesse affligeante : un éclairage blafard, des vitrines vieillottes, des salles désertes, des explications parcimonieuses. Le visiteur n'a qu'une envie au bout d'un moment : fuir cette ambiance lugubre et déprimante ! Inutile en sortant de passer par l'espace librairie. Pourtant il existe, mais les rayons en sont désespérément vides...



Au terme d'un nouveau déplacement en taxi, nous nous sommes retrouvés au bord de la Rangoon River dans le quartier de la pagode Botataung. L'endroit est pittoresque. C'est un point animé de franchissement de la rivière, large de plusieurs centaines de mètres. Des barques assurent la traversée des autochtones dans un environnement de milliers de mouettes attirées par des graines vendues aux visiteurs par des marchands à la sauvette. Lors de leur envol, on croirait une scène tirée des "oiseaux" d'Hitchcock !




Après un premier coup d'œil sur cet étonnant ballet de barques sur l'eau et de mouettes dans les airs, nous avons visité la pagode, dont l'histoire est voisine de celle de Sule découverte le jour de notre arrivée. Elle fut construite il y a plus de 2 000 ans par un ministre qui s’était vu remettre des reliques (cheveux) de Bouddha offertes par le roi Suvannabhumi. Une armée de mille soldats (Bo Tataung signifiant « mille soldats ») venus d’Inde se chargea d’escorter le coffret sacré jusqu’en Birmanie. Pendant la seconde guerre mondiale, la pagode fut entièrement détruite par les bombardements des Alliés. Grâce à la grande générosité du peuple, elle put être reconstruite à l'identique et vient d'être rénovée. Contrairement à la plupart des pagodes, celle-ci n’est pas pleine. Il est possible de pénétrer à l’intérieur, d’apercevoir des reliques et une foule de statues de Bouddha mises sous clefs, en empruntant un cheminement qui zigzague dans des petits réduits aux murs uniformément dorés et miroitants et dans les coins desquels certains prient.
 






Cerise sur le gâteau, nous avons affrété pour terminer la journée en beauté, une des barques à moteur qui assurent la liaison d'une rive à l'autre. Notre pilote nous a fait faire un petit circuit au soleil couchant, au milieu des bateaux au mouillage dans le lit de la rivière. Leurs coques sont souvent complètement rongées par de la rouille. On pourrait penser qu'ils sont voués à la casse et plus d'un m'ont fait penser au fameux Karaboudjian du capitaine Haddock dans "Les cigares du pharaon"...





Après un succulent jus de canne à sucre pressé devant nous, nous avons fait une pause toujours salutaire de fin de journée à l'hôtel, puis nous sommes allés dîner dans la 19ème rue, là où Olivier avait succombé à la tentation du mojito, avant-hier soir, une façon d'enterrer notre séjour à Rangoon, avant d'aborder demain la deuxième étape du voyage en Birmanie.


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